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Pourquoi la tokenisation va transformer l’infrastructure financière (2/2) : L’achat d’une action cotée
Spiko
29 Avril 2024

Pourquoi la tokenisation va transformer l’infrastructure financière (2/2) : L’achat d’une action cotée

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Chez Spiko, nous sommes convaincus que la tokenisation va bouleverser le fonctionnement des infrastructures du système financier durant la décennie à venir. L’objectif de cet article est de vous expliquer ce qu’est la tokenisation et ce qui nourrit notre conviction. Pas besoin d’être un expert de la plomberie financière, nous repartons de zéro !

Cet article est le second d’une série sur la tokenisation. Si vous n’avez pas lu notre précédent article sur les virements bancaires, nous vous conseillons de commencer par là.

Comment fonctionne l’achat d’une action cotée

Intéressons-nous maintenant aux instruments financiers avec l’exemple suivant : Alice a un PEA chez BNP Paribas et décide d’acquérir une action de l’entreprise Danone. Quatre étapes se déroulent alors :

  1. Alice utilise le site web de BNP Paribas pour placer son ordre d’achat.
  2. Une fois l’ordre d’Alice reçu, la banque transmet cet ordre à la bourse où s’échange l’action en question. Comme le reste des entreprises du CAC 40, Danone est une société cotée sur la bourse de Paris qui appartient au groupe privé Euronext.
  3. Au niveau d’Euronext, l’ordre d’achat provenant de BNP Paribas est appairé avec un ordre de vente correspondant. Supposons qu’il s’agisse d’un ordre de vente placé par la banque en ligne BoursoBank et provenant de Bob qui a une action Danone sur son compte-titres BoursoBank. Le prix de la transaction est alors fixé, disons à 57 EUR. Euronext informe BNP Paribas et BoursoBank de l’appariement entre l’ordre d’achat et l’ordre de vente.
  4. BNP Paribas informe dans la foulée Alice que son ordre d’achat est exécuté au prix de 57 EUR et BoursoBank informe simultanément Bob que son ordre de vente est exécuté pour 57 EUR.

Ces quatre étapes se déroulent en règle générale très rapidement, potentiellement en l’espace de moins d’une seconde. Pour Alice et Bob, tout semble s’arrêter ici. Mais en réalité ces étapes sont loin de conclure la transaction. En effet, BNP Paribas et BoursoBank doivent maintenant s’échanger les 57 EUR d’Alice et l’action Danone de Bob afin de finaliser la transaction. Et là les choses se compliquent…

Les étapes du post-marché

On désigne par le terme générique de “post-marché” les opérations qui ont lieu ensuite, en l’occurrence “après” la conclusion de la transaction sur la bourse. Voici de manière simplifiée comment les choses fonctionnent :

  1. Euronext envoie à une entité appelée “chambre de compensation” l’information qu’un ordre d’achat d’une action Danone par BNP Paribas auprès de BoursoBank pour 57 EUR vient d’être conclu en bourse. La chambre de compensation utilisée par Euronext pour les actions en France était historiquement LCH, filiale de la bourse de Londres, avant qu’Euronext décide récemment d’internaliser cette activité.
  2. La chambre de compensation va alors jouer deux rôles :
    • Premièrement, elle va s’occuper de coordonner les transferts de l’action Danone de Bob et des 57 EUR d’Alice entre BoursoBank et BNP Paribas. Ces transferts ne sont pas réalisés immédiatement mais seulement 48 heures après l’appariement des ordres. Ce délai est dû à la complexité des systèmes à mobiliser pour synchroniser les différentes bases de données impliquées dans le transfert.
    • Deuxièmement, elle va fournir un mécanisme de garantie. Si au bout de 48 heures, BoursoBank et/ou BNP Paribas ne sont pas capables d’honorer la transaction (par exemple en cas de faillite), la chambre de compensation s’en porte garante en puisant dans ses réserves qui sont alimentées par tous les utilisateurs de la chambre de compensation. Concrètement ces derniers, à l’instar des banques, avancent de l’argent - on appelle cela “poster du collatéral” dans le jargon financier - pour financer le mécanisme de garantie.
  3. Le transfert de l’action Danone entre les deux banques est réalisé dans la base de données du dépositaire central de titres. Le dépositaire central de titres est l’entreprise qui conserve la liste des détenteurs des actions Danone. En France, il s’agit d’Euroclear, une entreprise elle aussi privée. Le dépositaire central de titres retire alors une action Danone du compte de BoursoBank et ajoute une action Danone au compte de BNP Paribas.
  4. Simultanément, le transfert de 57 EUR entre les deux banques a lieu dans leurs comptes respectifs à la banque centrale (voir l’article précédent pour plus de détails sur ce sujet). La banque centrale débite de 57 EUR le compte de BNP Paribas et crédite de 57 EUR le compte de BoursoBank.

En synthèse - et de manière très simplifiée - voici le schéma de flux qui résume les opérations dont nous avons parlé :

Schéma simplifié des flux lors de l’achat d’une action cotée, Source : Spiko

Quel est le problème ?

Ce système de post-marché fonctionne et facilite le financement de l’économie en permettant des milliards d’euros de volumes de transactions par jour. Toutefois, il présente également de sérieuses limites. En effet :

  • Il est inefficace, dans la mesure où de nombreuses transactions ne sont même pas correctement finalisées au bout des 48 heures de délai imparti. Ces problèmes (on parle de “settlement failures”) exigent alors des interventions spécifiques.
  • Il est coûteux en frais et en capital immobilisé. En effet, les banques doivent payer l’assurance que fournit la chambre de compensation pendant les 48 heures entre l’appariement des ordres et la finalisation de la transaction. Et sans surprise, il s’agit de sommes colossales compte tenu de la taille des marchés financiers. Ces sommes sont indirectement facturées à Alice et Bob via les frais de leurs comptes-titres, de leur PEA, etc.
  • Il est fragmenté dans l’Union européenne. Nous vous avons présenté ci-dessus les quelques entreprises mobilisées dans le cadre de l’achat d’une action cotée en France. Mais chaque pays européen a sa bourse, sa chambre de compensation et son dépositaire central de titres. Même si une consolidation est à l’oeuvre depuis une vingtaine d’années, celle-ci demeure très imparfaite et a tendance à renforcer des monopoles ou quasi-monopoles privés.

Plusieurs initiatives en cours cherchent à améliorer la situation. Le régulateur européen tente par exemple de réduire le délai du post-marché de 48 à 24 heures. Mais il se heurte à d’importants freins des acteurs établis qui ont du mal à se débarrasser de la dette technique des systèmes existants.

Une solution plus ambitieuse : inscrire les instruments financiers sur la même base de données que la monnaie

Nous avons vu dans notre précédent article pourquoi l’usage par les banques d’une base de données commune pour la gestion des comptes en banque de leurs clients simplifierait grandement les virements. Ce changement de paradigme est appelé “tokenisation” dans l’industrie financière car il revient techniquement à représenter un euro par un jeton (token) qui s’échange sur une base de données partagée à l’instar d’une blockchain.

La tokenisation des instruments financiers permettrait de simplifier radicalement les opérations de post-marché. En effet, si les banques utilisaient une base de données partagée pour les titres et les euros, alors les multiples étapes de post-marché détaillées ci-dessus pourraient se limiter à deux modifications dans la même base de données : transférer 57 EUR d’Alice à Bob et une action Danone de Bob à Alice.

Il s’agit d’une priorité assumée par l’Union européenne. En effet, le droit communautaire a été modifié l’an dernier pour adapter les règles qui s’appliquent aux bourses, aux chambres de compensation et aux dépositaires centraux de titres pour permettre la tokenisation des instruments financiers. Le gouverneur de la Banque de France soulignait encore récemment l’importance de la tokenisation pour renforcer les marchés de capitaux européens.

Et Spiko là-dedans ?

Chez Spiko, notre ambition est de construire un leader de la tokenisation d’instruments financiers. Nos premiers produits seront des briques élémentaires de la finance, à savoir les deux premiers fonds monétaires de l’Union européenne dont les actions sont intégralement tokenisées. Ils s’adresseront aussi bien aux entreprises qu’aux particuliers avec l’objectif de leur permettre d’accéder facilement aux taux sans risque en euro et en dollar.

Vous voulez en savoir plus ? Nous vous recommandons la lecture de l’excellent rapport de la Banque de France intitulé « Paiements et infrastructures de marché à l’ère digitale »

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